PROTOCOLE EXTERNALISATION

PROTOCOLE EXTERNALISATION

 

Bernadette Herman – Jean Pierre Piquemal

Des personnes peuvent être confrontées à des difficultés relationnelles ou des comportements dont ils ont l’impression de ne pas pouvoir en sortir, comme si dans ces situations ils se sentaient dépendants de réponses toutes faites intérieures à eux même. Par exemple : relation avec un collègue, un conjoint ou ex conjoint, une personne hiérarchiquement supérieure, prise de parole en groupe ou en public impossible, besoin incontrôlable de s’excuser…

Tout se passe comme si une « force » incontrôlable les poussait à adopter ce positionnement qui ne fait que renforcer le problème et qui fonctionne comme une auto validation du problème.

Ce sentiment profond de ne pas maitriser participe à renforcer le symptôme et ce sont les tentatives de résoudre le symptôme qui deviennent le problème et le renforcent.

La tentation et souvent la solution qu’ils envisagent est de changer l’autre. Il s’agit là d’une mission impossible. On ne peut changer l’autre, on ne change pas les gens, on ne peut que se changer soi-même mais aussi changer notre relation aux autres.

Une lecture usuelle de la problématique par le thérapeute risque de déboucher sur un renforcement du symptôme, thérapeute et personne étant rapidement dans un sentiment commun d’impuissance.

Dans la phase 7 (quels inconvénients si abandon du symptôme) les hypothèses faites par le thérapeute n’ont pas la prétention d’être justes ou vraies, pertinentes ou fantaisistes. Le fait qu’elles soient dites, seront différentes de celles que la personne a déjà pu faire et va renforcer sa créativité, l’amener sur des aspects paraissant inenvisageables dans sa vision de la situation.

Notre mode de lecture doit changer et sortir des sentiers battus. Je pense ici à une réflexion de Michel Onfray « il y a plus de raison et d’intelligence chez Eve que chez Adam _ ce que montre son désir de gouter au fruit défendu, fruit de l’arbre de la connaissance, et sa volonté de savoir là où l’homme se contentait d’obéir ». Une telle lecture de la Genèse aurait sans doute modifié la vision du monde et des rôles de chacun.

Trois éléments sont à l’origine de ce protocole :

-          le principe posé dans l’approche narrative « le problème est le problème, la personne est la personne, la personne n’est pas le problème » White (éducateur, thérapeute familial Australien),

-          l’approche Ericksonienne de l’hypnose,

-          le livre de Watzlanvick «  faites vous-même votre malheur» qui montre comment nous pouvons faire le choix de renforcer un symptôme.

     

      1. TRAVAILLER LA KINESTHESIE :

Travailler avec les sensations physiques est souvent important pour préparer la phase cinq du protocole où l’on va demander quelles sensations physiques précèdent l’apparition du problème. Les items sont de l’ordre :

«Vous sentez vos bras sur le fauteuil, votre main sur votre genou, votre dos contre la chaise, l’air qui pénètre dans votre nez etc »

     

      2. IDENTIFIER LE PROBLEME :

Cette description doit être courte, et surtout ne pas entrer dans les justifications du symptôme.

 

      3. FAIRE DECRIRE LE PROBLEME :

a.Couleur

b.Forme

c.taille

d.consistance

e.température

 

      4.  LA PERSONNE LUI DONNE UN NOM

Un nom qui n’a pas de rapport direct avec le problème, bannir les sentiments, émotions ou noms qui définissent le problème.

A partir de ce moment nous n’utiliserons plus que ce nom pour parler du problème. (XXX)

      

      5. A QUELS MOMENTS APPARAIT XXX ?

 

      6. JUSTE AVANT QUE XXX APPARAISSE QUELLES SONT LES SENSATIONS PHYSIQUES ?

 

      7. LES INCONVENIENTS OU QU’EST-CE QUE JE NE POURRAIS PLUS FAIRE OU QU’EST-CE QUE JE SERAIS OBLIGE DE FAIRE SI XXX N’APARRAISSAIT PAS ?

Dans cette phase et pendant que la personne réfléchit, l’intervenant peut sous la forme de:

« Peut-être que ou peut-être pas » faire des hypothèses à voie haute sur les inconvénients qu’il y aurait à l’absence de XXX.

Le travail du thérapeute consiste à proposer sous le format ci-dessus des hypothèses sur la fonction du symptôme, son utilité, de quoi il préserve.

La personne n’est pas tenue de nous dire quels inconvénients elle a trouvé. Elle précise simplement qu’elle a trouvé.

      

      8. OU SE SITUE XXX DANS VOTRE CORPS ?

La personne montre l’endroit où elle voit XXX dans son corps et maintient sa ou ses mains dessus.

 

      9. OU VOUDRIEZ- VOUS METTRE XXX ?

Très souvent les personnes proposent de le mettre en dehors de la pièce ou derrière eux, nous n’acceptons pas en disant par exemple : «  là où vous mettez XXX, vous ne pouvez pas voir ce qu’il fait ». Lorsque la personne a trouvé un endroit plus adéquat, travailler sur le positionnement exact : « plus bas, plus haut, à droite ou à gauche etc … »

 

      10. DISSOCIATION :

Nous allons demander à la personne de sortir mentalement de la situation présente pour se regarder avec XXX à ses côtés, un peu comme on regarde un film de vacances où nous figurons.

Pendant cette phase nous allons demander à la personne de trouver un geste inhabituel, qui crée une sensation physique, geste que seul XXX et la personne peuvent voir et reconnaître. Faire expérimenter ce geste. Faire préciser si elle pense que XXX a compris ce geste

La personne garde le geste pour elle

 

      11. CONCLUSION :

L’important dans la conclusion que nous donnons est d’introduire l’idée que quoi que fasse XXX, la personne a le contrôle.

Voici celle que j’utilise généralement :

«  Maintenant vous savez comment dire à XXX qu’il est sous votre contrôle. Vous pouvez donc lui interdire de se manifester. Mais il se peut qu’à certains moments, dans certaines circonstances, vous pensiez qu’il vaut mieux le laisser se manifester et dans ce cas là, il ne peut agir qu’avec votre approbation et que c’est bien à ce moment là, dans ces circonstances, dans ce contexte que pour cette fois, vous l’autorisez à se manifester. »

 

 

BIBLIOGRAPHIE

Milton H. Erickson et Ernest L. Rossi, L'intégrale des articles de Milton H. Erickson. Tome 1 : De la nature de l'hypnose et de la suggestion, New York, Irvington,‎ 1980

Mickael white Les moyens narratifs au service de la thérapie éditeur SATAS, 2003

Michel Onfray Cosmos Flammarion 2015